Il est un principe connu en Droit des sociétés, selon lequel un voile sépare la personnalité juridique de la société de celle de ses actionnaires. Cependant ce voile n'est pas hermétiquement scellé et ne met pas à l'abri la société de voir sa responsabilité engagée en raison d'abus ou de dysfonctionnements de ce principe dit "de la personnalité juridique distincte". Ainsi, il est parfois nécessaire de lever le voile qui dissimule l'entreprise. Tel est le cas notamment lorsque ce voile constitue la seule preuve de l'existence économique de la société. La levée du voile annihile la séparation entre la personnalité juridique de la société et celle des actionnaires et empêche les actionnaires d'usurper la personnalité juridique de la société à des fins non légitimes ou frauduleuses qui leur permettraient par exemple d'éviter de voir leur responsabilité pénale engagée suite à la commission d'activités illégales.
Dans une affaire portée devant le Tribunal de district de Haifa en juin 2017, un courtier avait déposé une requête pour récupérer des commissions lui revenant, en se fondant sur un accord oral et écrit. Le contrat écrit désignait une société comme responsable du paiement des commissions. La Cour a jugé que bien que le défendeur avait choisi d'exécuter ses obligations en vertu de l'accord contracté avec la société, cela ne caractérisait pas pour autant la société de partie contractante.
La Cour a par ailleurs jugé qu'au regard de l'absence de preuve sur le but, le contenu et le capital ou l'activité commerciale de la société mais encore faute de résolution établissant la volonté pour la société de contracter avec le courtier, il ne s'agissait en réalité que d'une tentative visant à échapper au paiement des commissions dues.
Au regard de telles circonstances, la Cour a décidé que la société devait être purement et simplement ignorée et que "le voile recouvrant la société devait être levé".
Contrairement au but "classique" de la levée du voile corporatif, qui consiste à attribuer les obligations et droits de la société à ses actionnaires, lorsque l'on lève le voile "virtuel" de l'entreprise, le voile est considéré comme inexistant et, par conséquent, l'actionnaire est assimilé à l'entreprise. En ignorant le voile dans de telles circonstances, la Cour a jugé que le défendeur supporterait le paiement des commissions en lieu et place de la société. Il est à noter que le défendeur a prétendu qu'en tant que Directeur du groupe détenant la société, il n'était pas actionnaire et que la levée du voile ne l'impacterait pas par conséquent et ne pourrait en aucun lui créer des obligations vis-à-vis du courtier. La Cour a estimé qu'il fallait ignorer le voile corporatif et non le "lever" et que dès lors, cet argument renforcerait la conclusion selon laquelle les obligations incombent au défendeur en vertu de l'accord.
À la lumière de cette décision particulièrement innovante, il est recommandé, encore plus désormais, de solliciter l'aide d'un avocat tant dans le cadre de la rédaction de tout accord commercial que lorsqu'une société est impliquée, même quand la personne à la tête de ladite société n'est pas elle-même l'un de ses actionnaires.