Le conseil d'administration est l'organe chargé de prendre la plupart des décisions courantes de l'entreprise. Il faut toutefois garder à l'esprit que ses membres sont des êtres de chair et de sang dont les intérêts peuvent entrer en conflit avec ceux de la société et de ses actionnaires. Comment résoudre la tension entre le risque de stagnation et le conflit d'intérêts des membres du conseil ? La réponse n'est pas tranchée...
Le principal mécanisme pour prévenir les conflits d'intérêts et la prise de décisions qui ne sont pas dans l'intérêt de l'entreprise par son conseil d'administration est l'exigence d'approbations spéciales pour les transactions pour lesquelles on craint que les dirigeants ou les actionnaires de contrôle n'exercent leur pouvoir à des fins personnelles. Ainsi, par exemple, la Loi israélienne sur les Sociétés exige que toute transaction soit au bénéfice de la société et stipule dans certains cas l'obligation d'obtenir l'approbation des organes de l'entreprise, qu'il s'agisse du comité d'audit, du conseil d'administration ou, parfois, même des actionnaires. Lorsqu'une décision est dûment prise conformément au mécanisme requis, le conseil reçoit une sorte d'« immunité » connue sous le nom de « règle du jugement commercial » — une règle qui, lorsqu'elle est dûment suivie, protégera le conseil d'administration contre une ingérence du Tribunal, même si la décision s'avère être incorrecte.
Cependant, cette immunité n'est pas totale et parfois le Tribunal examinera la décision sur le fond en appliquant une norme d'« équité totale » ou au moins en examinant une norme intermédiaire sous la forme d'un « examen renforcé » (Enhanced Scrutiny). Il est important de noter que chacune de ces règles constitue une norme flexible qui varie selon les circonstances de l'affaire, le conflit d'intérêts du conseil d'administration et le préjudice causé aux actionnaires de la société, et il s'agit d'un examen flexible.
Ainsi, par exemple, une affaire tranchée par la Cour Suprême en décembre 2021 portait sur une transaction dans laquelle l'actionnaire de contrôle d'une société publique a acheté la plupart des actions du public, de sorte que la société est devenue privée. Il a été jugé qu'en plus de l'approbation de la transaction par les mécanismes stipulés par la loi, les négociations relatives à la transaction devaient être menées par un comité indépendant. Cependant, dans ce cas particulier, les défauts dans le travail du comité étaient mineurs, de sorte que la « règle du jugement commercial » s'appliquait toujours.
Dans une affaire tranchée par la Cour Suprême en août 2021, il a été jugé que la « règle du jugement commercial » pouvait être étendue pour s'appliquer également aux omissions (abstentions) du conseil d'administration. Dans cette affaire, cependant, la Cour n'a pas appliqué la règle, car le conseil d'administration a manqué à son devoir de diligence, ses décisions ayant été prises de manière uniforme, et son manque de prudence a entraîné l'entrée de l'entreprise dans la « liste de préservation » de la bourse et le risque de radiation. Toutefois, il a été mentionné en remarque incidente qu'un manquement au devoir de diligence ne suggère pas catégoriquement, en soi, la perte de la protection de la « règle du jugement commercial ».
À la lumière de ce qui précède, et en raison de l'incertitude entourant le domaine des transactions avec conflit d'intérêts et le contenu des diverses règles, ainsi que leur portée — qui varie d'un cas à l'autre — il est très important d'être accompagné par un avocat expérimenté dans le domaine des sociétés et des contrats. Celui-ci assistera l'entreprise dans le processus de prise de décision et de documentation, et mènera un examen complet de la conformité aux conditions de la loi, et en particulier aux articles liés aux transactions avec conflit d'intérêts. L'avocat doit être impliqué dans tous les détails de la transaction, la procédure d'examen et le processus d'approbation, afin de pouvoir vérifier que toutes les procédures sont dûment effectuées, d'une manière qui puisse accorder aux dirigeants une immunité au cas où la transaction ne se déroulerait pas comme prévu.

